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Socrate

Socrate est le prototype du philosophe, tant pour les philosophes eux-mêmes que pour la population générale.

Socrate est inactuel, à jamais actuel et paradoxal (contre la doxa).

Socrate est un maître de sagesse, qui conçoit la philosophie comme éducation et thérapie de l'âme, et le dialogue est son outil central dans cette démarche, puisqu'il n'a écrit aucun texte.
La philosophie telle que conçue par Socrate est profondément existentielle : sa question n'est pas comment penser, mais comment vivre.

Une vie sans examen ne mérite pas d’être vécue

Platon|Apologie de Socrate

L'enquête de Socrate

L'oracle de Delphes, après que Socrate lui ai demandé si il existait quelqu'un de plus savant (possédant science et sagesse) que lui, donne une réponse négative.

Socrate, simple artisan ne se considérant porteur d'aucun savoir, est embarrassé et se met en quête de plus savant que lui:

J’allai à un des hommes qui passaient pour savants, certain que je pourrais là, ou nulle part, contrôler l’oracle et ensuite lui dire nettement : « Voilà quelqu’un qui est plus savant que moi, et toi, tu m’as proclamé plus savant. » J’examinai donc à fond mon homme ; — inutile de le nommer ; c’était un de nos hommes d’État ; — or, à l’épreuve, en causant avec lui, voici l’impression que j’ai eue, Athéniens. Il me parut que ce personnage semblait savant à beaucoup de gens et surtout à lui-même, mais qu’il ne l’était aucunement. Et alors, j’essayais de lui démontrer qu’en se croyant savant il ne l’était pas. Le résultat fut que je m’attirai son inimitié, et aussi celle de plusieurs des assistants. Je me retirai, en me disant : « À tout prendre, je suis plus savant que lui. » En effet, il se peut que ni l’un ni l’autre de nous ne sache rien de bon ; seulement, lui croit qu’il sait, bien qu’il ne sache pas ; tandis que moi, si je ne sais rien, je ne crois pas non plus rien savoir. Il me semble, en somme, que je suis tant soit peu plus savant que lui, en ceci du moins que je ne crois pas savoir ce que je ne sais pas.

Platon|Apologie de Socrate

Ainsi, Socrate met en avant la sagesse de l'ignorance face au croire-savoir et à l'ignorance insue, qui donnent lieu à la prétention et à la présomption.

Grâce à cette enquête, il se découvre seul à savoir qu'il ne sait pas: cette conscience de soi est le point de départ de la conscience philosophique.

Qu'est ce que tu fais quand tu fais ce que tu fais : de la technique à l'éthique

Tous les interlocuteurs de Socrate ont des savoir-faire et ont l'instruction nécessaire à l'exercice de leur métier. Sont-ils bien savants pour autant?
Ils ignorent l'essentiel : ils ignorent l'objet de leur savoir. Ils savent faire mais ils ne savent pas ce qu'ils font.

Par exemple, les politiciens d'Athènes savent:

  • parler au peuple
  • persuader de prendre des décisions
  • prévoir les conséquences d'un engagement
  • commander aux hommes

Cependant, savent-il pourquoi, dans quel but ils font cela? Savent-ils pour quoi il font les choses, dans quelle finalité?
"Justice" est un mot qui apparaît alors, mais aucun ne sait le définir: il déborde la compétence d'un politicien.

Alors que l'on touche au fondement de nos actes, notre savoir disparait : les grands idéaux, les valeurs, sont simples à invoquer mais difficiles à définir.

L'éthique dans la philosophie antique c'est le travail qui permet de changer la vie et de changer notre manière d'être dans la vie.
La matière première de l'éthique c'est nos actions, nos désirs, les difficultés qu'on rencontre dans la vie, nos mal-êtres.
L'éthique, c'est donc la philosophie des valeurs, qui nous demande quel est notre port, quel est le sens de notre vie:

Il n'y a pas de vents favorables pour qui ne connait pas son port.

Sénèque

En nous invitant à convertir notre regard, de ce que l'on a à ce que l'on est, Socrate soigne notre humanité.

Références